Pourquoi la fonction achat est-elle stratégique ?

Pourquoi la fonction achat est-elle stratégique ?

ACP FORMATION : Pourquoi la fonction achat est-elle stratégique dans les entreprises et les administrations ?

Sylvie Devin Lepie : Les entreprises ont donné une valeur stratégique à la fonction achat dans les années 70/80 après le choc pétrolier ; après avoir optimisé les coûts de production en diminuant les coûts de main-d’œuvre, il s’agissait de trouver d’autres sources de gain : la façon d’acheter est alors reconsidérée puisque l’on s’aperçoit que 5 % d’économie sur le poste achat de produits ou matières premières impacte directement le résultat de l’entreprise de 25 % ! On observe alors un développement des processus orientés vers la création de valeur et la mise en œuvre d’une gestion de la chaîne logistique (le « supply chain management ») dans laquelle l’acheteur joue un rôle primordial d’animateur de la transversalité. La fonction achat mute vers une fonction économique et stratégique et elle n’a pas cessé d’évoluer depuis… Nous avons aujourd’hui de véritables professionnels du management de l’achat !

 

ACP FORMATION : Pourquoi investir sur l’achat aujourd’hui ?

Sylvie Devin Lepie : Dans le secteur public, et notamment depuis 2001 avec la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF), nous assistons à un changement radical des concepts et des logiques de gestion…

En effet, les modes de gestion des organismes publics évoluent  car d’une logique de « dépenses publiques », on passe à une logique « d’achats publics », c’est-à-dire d’une conception « juridique et comptable » à une conception toujours « juridique » parce que nécessaire mais surtout à une conception « économique »…

Hier, on dépensait pour « exécuter un budget », en assurant un équilibre entre les recettes et les dépenses, en gérant et en administrant des ressources et des moyens, et en respectant des règles juridiques et administratives …

Aujourd’hui, il s’agit de bien acheter pour « optimiser un budget » ! La logique de l’achat public passe par la réussite du budget prévu pour les activités et missions de l’organisme, par la mise en œuvre de programme d’actions, par la responsabilisation des acteurs, le management des ressources et des moyens. Il est question d’atteindre des objectifs, de satisfaire à des exigences de résultats tout en respectant, bien évidemment, les règles juridiques et administratives…

Dans ce contexte, le recentrage de l’achat public s’effectue sur le principe de l’achat privé et la création de valeur de la fonction achats se cristallise autour de :

  • la maîtrise des méthodes et techniques d’achat,
  • la connaissance des coûts des produits ou services,
  • la connaissance technique des produits et services,
  • la connaissance du marché fournisseur… (sourcing, négociation)
  • Sans omettre la connaissance des données juridiques pour l’élaboration et la gestion des actes d’achat…

Dans ce contexte, la fonction achat permet de :

  • valoriser et adapter les produits et les services aux besoins et exigences des « clients internes » ou « externes » tel que l’administré – contribuable – électeur !
  • optimiser la qualité, les prix/coûts et les délais des services, améliorer la réactivité et la disponibilité,
  • rechercher et développer les capacités d’innovation des opérateurs économiques,
  • maîtriser la relation fournisseur,
  • maîtriser et réduire les coûts internes,
  • garantir la régularité des actes et des procédures d’achat, intégrer les NTIC,
  • rechercher l’efficience des processus internes, des ressources et des moyens…

La fonction achat est une fonction essentiellement transversale avec pour interfaces :

  • le marché des fournisseurs connu et potentiel, pour optimiser les modalités de satisfaction des besoins,
  • les prescripteurs des besoins chargés de définir et d’exprimer les besoins, ce qui permet :
    • d’élaborer et gérer le programme d’achat,
    • d’échanger des informations sur les besoins et les possibilités des marchés fournisseurs,
    • de définir la stratégie d’achat
    • d’évaluer les résultats obtenus dans la satisfaction des besoins.

La fonction achat est par conséquent fondamentale pour intégrer l’innovation dans l’achat public.

 

ACP FORMATION : Pouvez-vous citer des exemples concrets d’expérience sur lequel une démarche achat structurée a été engagée et qui a permis d’obtenir résultats significatifs (gains financiers, amélioration de la qualité des prestations ou des relations partenariales) ?

Sylvie Devin Lepie : Voici quelques exemples :

Exemple 1 : Gestion du portefeuille d’achats d’une ville (16 M€ budget prévisionnel total achat, fonctionnement et investissement)

La 1ère année, avec un taux de couverture des achats de 20.4 % environ (3.2 M€) et portant essentiellement sur les achats généraux (fonctionnement), 551 000 € d’économies ont été réalisées (soit 17 %).

Exemple 2 : Marché d’enfouissement de réseau (120 M€)

Stratégie : la mise en place de lots financiers en lieu et place de lots géographiques… Un nombre maximal de lots est attribué selon la capacité technique et financière du soumissionnaire.

Résultat : ouverture de la concurrence optimisée, meilleure répartition des travaux selon la capacité et disponibilité des entreprises, respect des délais sur un périmètre géographique acceptable pour chacune avec un potentiel de chiffre d’affaires annoncé…

Exemple 3 : Marché de mobilier urbain 

Stratégie : analyse de la conception d’une barrière piétonne et mise en place de plan prévisionnel d’approvisionnement dans le marché

Résultat : réduction des coûts de matières premières et des coûts de fabrication ainsi que des délais de mise à disposition, le titulaire pouvant mieux organiser sa chaîne de production et la logistique, dont le regroupement des livraisons.

 

Sylvie Devin Lepie
Consultante Management Achats – Secteurs public et privé

 

Pour aller plus loin, nous vous conseillons de suivre la formation Définir et mettre en oeuvre la politique d’achats de l’organisme public