L’arrêté du 30 septembre 2021 : vive les nouveaux CCAG nouveaux !

Tandis que les six nouveaux CCAG 2021 sont pleinement entrés en vigueur au 1er octobre 2021, un nouvel arrêté a été adopté le 30 septembre 2021, publié au Journal officiel le 7 octobre 2021, afin d’assurer – déjà – un premier toilettage de ces nouveaux textes.

Matthieu Kluczynski et Anaëlle Fédida du cabinet ADMYS Avocats, nous en disent davantage sur ce nouveau texte entre réajustements, corrections de coquilles et rééquilibrages substantiels.

 

ACP Formation : Les correctifs apportés par l’arrêté du 30 septembre sont-ils d’une grande ampleur ?

ADMYS Avocats : De multiples corrections sont apportées par cet arrêté modificatif. Néanmoins, ces modifications ne sont pas toutes de la même importance.

D’une manière générale, il s’agit principalement de corriger des coquilles telles que des erreurs dans les renvois à certains articles notamment dans le CCAG Travaux (le commentaire sous l’article 5.3 sur les mesures de sécurité ne renvoie plus aux articles 413-1 à 413-8 du Code pénal mais aux articles 413-7 et R.413-1 à R.413-5 dudit code) mais aussi dans le CCAG FCS qui comportait une erreur dans les renvois entre les articles  (l’article 43 relatif au décompte de liquidation renvoie désormais à l’article 45 non plus à l’article 44).

Nous avons d’ailleurs eu l’occasion de pointer ces coquilles à l’occasion des formations proposés par ACP sur les nouveaux CCAG.

L’arrêté modificatif vise également à préciser certaines définitions contenues dans les CCAG. A titre d’exemples, dans le CCAG Travaux, la notion de « représentant du pouvoir adjudicateur » est remplacée par celle de « maître d’ouvrage » ; dans le CCAG Maîtrise d’œuvre la demande de paiement finale adressée par le maître d’œuvre est désormais dénommée en « projet de décompte final » en lieu et place de « décompte final ».

 

ACP Formation : Quels sont les CCAG les plus impactés par cet arrêté ?

 ADMYS Avocats : Si tous les CCAG sont concernés par cet arrêté modificatif, il peut être noté que ce sont principalement les CCAG Maîtrise d’œuvre et Travaux qui sont impactés.

Une modification commune à ces deux CCAG peut d’ailleurs être relevée à ce stade : l’arrêté modificatif confie une valeur contractuelle à la définition du BIM (« Business Information Modelling » ou « Modélisation d’informations de la construction »). En effet, l’article 2 du CCAG MOE et l’article 2 du CCAG Travaux sont modifiés afin d’intégrer cette définition, qui jusque-là, figurait seulement au sein de commentaires, lesquels n’ont pas de valeur contractuelle.

 

ACP Formation : Quelles sont les modifications spécifiques au CCAG Travaux ?

ADMYS Avocats : Première modification importante : l’article 3.8.1 du CCAG Travaux relatif aux ordres de services émis par le maître d’œuvre est complété. Pour rappel, dans sa version issue du 1er avril 2021, le CCAG Travaux imposait que de tels ordres de services soient validés par le Maître d’ouvrage sans toutefois en préciser les modalités. Désormais, le Maître d’œuvre doit prouver au titulaire cette validation, en annexant à l’ordre de service un justificatif.

Il est important que ce formalisme soit respecté par le Maître d’œuvre et le Maître d’ouvrage afin d’assurer d’une part, la régularité de tels ordres de services et, d’autre part, leur exécution par le titulaire.

En effet, en l’absence de preuve d’une telle validation, le titulaire ne sera pas tenu d’exécuter l’ordre de service en question. La vigilance du Maître d’œuvre est donc requise puisqu’un refus d’exécution d’un ordre de service par un titulaire est susceptible d’engendrer un retard dans le calendrier d’exécution des travaux.

 

ACP Formation : Et pour le CCAG MOE ?

 ADMYS Avocats : Parmi les corrections les plus importantes, on note la suppression à l’article 32.5 de la précision selon laquelle le défaut de notification du décompte de résiliation dans le délai de deux mois imparti au maître d’ouvrage constitue un différend au sens de l’article 35.2. L’arrêté a également supprimé les clauses qui définissaient l’apparition d’un différend (prise de position ou silence de l’acheteur sur une mise en demeure du titulaire l’invitant à prendre position).

Le règlement des comptes a également été modifié par cet arrêté du 30 septembre 2021. D’abord, le délai dans lequel le projet de décompte final doit être notifié est désormais de 30 jours et il est précisé qu’il court à compter de la date de fin de la garantie de parfait achèvement (article 11 du CCAG MOE).

Enfin, l’arrêté du 30 septembre 2021 a ajouté des précisions en cas de réclamation portant sur le décompte général du marché. Il est précisé que le mémoire est transmis dans un délai de 30 jours à compter de la notification du décompte général et reprend, « sous peine de forclusion », les réclamations formulées antérieurement à la notification du décompte général et qui n’ont pas fait l’objet d’un règlement définitif. Cette formule – qui paraîtra bien habituelle pour les plus initiés à l’exécution des marchés publics – a le mérite de la clarté sur les risques encourus en cas d’incomplétude du mémoire.

A l’évidence, au regard de l’ensemble de ces modifications, force est de constater que l’objectif des rédacteurs était d’aligner les règles sur celles applicables en marchés publics de travaux.

 

ACP Formation : A quelles consultations s’appliquent les dispositions de cet arrêté ? 

ADMYS Avocats : Cet arrêté, bien que daté du 30 septembre 2021, n’a été publié au Journal officiel de la République Française qu’au 7 octobre 2021. Conformément au principe selon lequel « la loi ne dispose que pour l’avenir », l’article 8 dudit arrêté prévoit donc une application à compter du lendemain de cette publication, à savoir le 8 octobre 2021.

Dès lors, les articles des CCAG modifiés par cet arrêté ne s’appliqueront qu’aux marchés pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis d’appel public à la concurrence envoyé à la publication à compter du 8 octobre 2021.

Cette dualité de régime, seulement quelques semaines après l’entrée en vigueur des nouveaux textes, pourrait susciter quelques difficultés d’exécution sur la mise en œuvre des clauses ainsi précisées.

 

ACP Formation : D’autres arrêtés modificatifs sont-ils amenés à être publiés ?

ADMYS Avocats : Il y a lieu de rappeler que la réforme des CCAG poursuivie par la DAJ avait pour objectif premier de sécuriser l’interprétation de ces textes par les acheteurs afin d’harmoniser les pratiques. On le voit donc, cet arrêté modificatif poursuit cet objectif dans la mesure où il corrige, améliore et clarifie les six CCAG publiés au 1er avril 2016. Mais l’on peut aussi craindre l’adoption d’autres arrêtés modificatifs qui, s’ils s’avéraient nombreux, conduiraient à fragiliser la bonne maîtrise de ces outils par les acheteurs et les opérateurs.

Sans doute faut-il espérer que la DAJ saura conjuguer sa recherche de sécurité juridique avec la stabilité contractuelle attendue par les acteurs de la commande publique.

 

Pour en savoir plus, vous pouvez suivre les formations « Les nouveaux CCAG en marchés publics » ou « La réforme des CCAG«