Le décret du 21 février 2024 : un nouveau souffle pour la commande publique circulaire !

Cet article étudie le décret n° 2024-134 du 21 février 2024 relatif à l’obligation d’acquisition par la commande publique de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées et à l’interdiction d’acquisition par l’État de produits en plastique

 

Contexte dans lequel s’insère le décret commenté

En application de l’article 58 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, « à compter du 1er janvier 2021, les biens acquis annuellement par les services de l’État ainsi que par les collectivités territoriales et leurs groupements sont issus du réemploi ou de la réutilisation ou intègrent des matières recyclées (…) selon le type de produit ».

Ainsi, le décret n° 2021-254 du 9 mars 2021 relatif à l’obligation d’acquisition par la commande publique de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées a fixé, à son article 1er, une liste des produits ou catégories de produits acquis par les personnes publiques précitées et des proportions minimales devant être issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées.

Mais le décret n° 2024-134 du 21 février 2024, publié au Journal Officiel le 23 février 2024 et entrant en vigueur à compter du 1er juillet 2024 (article 6) vient abroger ce décret de 2021 (article 5), permettant ainsi de gagner en précisions et d’établir une véritable feuille de route progressive à respecter jusqu’en 2030.

N.B. : tous les articles cités entre parenthèses correspondent aux articles du décret commenté.

 

Quelles sont les personnes publiques concernées par ce décret ? (article 1)

Le décret de 2024, à l’instar de son prédécesseur, vise l’État, ainsi que les collectivités territoriales et leurs groupements.

 

Quels sont les biens concernés ? (article 2)

Les 17 catégories de produits ciblées par le présent décret sont explicitées au sein de son unique annexe, et résumées comme suit :

 

1 Produits textiles à l’exception des équipements de protection individuels
2 Matériel informatique et téléphonie
3 Matériel de reprographie et d’impression
4 Consommables d’impression
5 Papier
6 Fournitures de bureau
7 Engins de transport et pièces détachées
8 Véhicules et pièces détachées
9 Mobilier et aménagement d’intérieur
10 Mobilier urbain
11 Équipement de collecte des déchets
12 Bocaux et flacons
13 Articles et équipement sportifs
14 Matériel d’entretien des espaces verts
15 Bâtiments modulaires ou préfabriqués
16 Gros électroménager, y compris appareils professionnels
17 Jeux et jouets

Par ailleurs, un arrêté du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé de l’environnement – à venir – devra préciser la liste détaillée des produits relevant de chaque catégorie susmentionnée.

 

Comment acquérir les biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées ? (article 1)

Les personnes publiques concernées peuvent acquérir les biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées par deux voies distinctes :

  • au moyen de marchés publics de fournitures ou de travaux et de services lorsqu’ils portent également sur des fournitures ;
  • au moyen de dons portant sur une liste de produits proposés sur une plateforme des dons mobiliers des administrations (à déterminer par un arrêté du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé de l’environnement).

 

Les obligations issues du décret doivent-elles être déclarées ? (articles 3 et 6)

Oui, les personnes publiques visées doivent déclarer la part de leurs dépenses annuelles dans le cadre de marchés publics et la valorisation des dons acquis pour chaque catégorie de produits sur le portail national de données ouvertes prévu à l’article R.2196-1 du Code de la commande publique.

Les modalités de cette déclaration seront fixées par arrêté – à venir – du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé de l’environnement.

En ce qui concerne l’année 2024, les modalités du décompte et de déclaration des dépenses effectuées au cours de cette années seront adaptées de façon à tenir compte des modifications opérées par le décret.

La valorisation des dons est réalisée sur la base d’un barème prévu par arrêté du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé de l’environnement.

 

Apport du présent décret au profit exclusif de l’État :

Le décret commenté modifie également l’article 2 du décret n°2022-2 du 4 janvier 2022, en ajoutant un nouveau cas de dérogation à l’interdiction, prévue à son l’article 1er, puisque l’État peut user de produits en plastique à usage unique, lorsque « les situations dans lesquelles l’utilisation de sacs poubelle en plastique à usager unique est nécessaire pour des raisons de santé ou de sécurité » (article 4).

Il en résulte de toutes les conséquences du présent décret qu’il permet, aux personnes publiques qui y sont contraintes, d’anticiper les exigences et organiser leurs achats annuels jusqu’en 2030, ce qui est souhaitable pour tout acheteur.

Enfin, il convient de rappeler que les pourcentages prévus par le décret de 2024 ne sont que des minimums, les personnes publiques sensibles au développement durable pouvant aller bien plus loin dans cette pratique résolument verte.

 

Article rédigé par Maîtres Matthieu Kluczynski, Avocat Associé, ADMYS Avocats et Florian BLUM, avocat collaborateur

Pour aller plus loin, nous vous recommandons de suivre la formation Intégrer le développement durable dans les marchés publics