Le PNAD 2022-2025 : la feuille de route des acheteurs pour voir la vie en vert (et rose !)

Matthieu Kluczynski, associé du cabinet ADMYS Avocats, répond à nos questions sur le nouveau PNAD (Plan National pour des Achats Durables), dévoilé en mars dernier. Ce document dont on parle peu se révèle stratégique et dévoile les principales orientations à venir de l’Etat pour promouvoir le développement durable dans les contrats de la commande publique.


Matthieu Kluczynski

ACP Formation : Qu’est-ce que le PNAD ?

Matthieu KLUCZYNSKI : Lundi 14 mars a été dévoilé le nouveau « Plan National pour des Achats Durables » ou « PNAD » pour la période 2022-2025. Comme l’a annoncé le Commissaire général au développement durable, ce document constitue la feuille de route de l’Etat pour développer l’achat durable. L’objectif est d’étendre de manière massive et généralisée les considérations environnementales et sociales dans l’ensemble de l’achat public.

Ce document n’est pas nouveau, deux plans avaient déjà été élaborés sur des périodes précédentes, mais ils étaient largement méconnus ou même ignorés par les acheteurs. Ces documents comportaient de grandes orientations, mais un faible niveau d’encadrement et de gouvernance pour décliner leurs mises en œuvre.

Le nouveau plan se veut plus ambitieux, avec une démultiplication des axes d’action, le développement de la sensibilisation des acteurs locaux et la communication sur les bonnes pratiques en prônant la stimulation par l’exemplarité. Ce plan incite encore à l’évaluation régulière des moyens mis en œuvre pour promouvoir la commande publique durable.

Quels sont les axes envisagés par le PNAD ?

Matthieu KLUCZYNSKI : Ce document propose 22 actions à mettre en œuvre par les acheteurs, organisées autour de 6 axes principaux : élaborer et diffuser des outils et accompagner les acheteurs, mobiliser le levier de la formation, agir auprès des décideurs, animer les réseaux d’acheteurs, promouvoir les achats durables, suivre l’exécution du plan. Il faut relever que chaque action précise l’entité qui pilote l’action, les livrables à venir et le calendrier de mise en œuvre envisagé.

On remarque ainsi que la stratégie proposée ne concerne pas uniquement les pratiques à mobiliser dans le cadre de la rédaction des marchés. L’objectif est de changer la manière dont les acheteurs envisagent leurs achats, que ce soit au niveau des services achats comme des représentant des acheteurs (élus locaux, directeurs selon les types de structures).

Il faut certes reconnaitre que plusieurs de ces 22 actions sont très similaires ou constituent la même ambition présentée de plusieurs manières différentes. Cependant, des outils clairs se démarquent. Tel est le cas du site RAPIDD (le Réseau des administrations publiques intégrant le développement durable) qui, aujourd’hui, constitue davantage une plateforme d’échanges pour les acheteurs publics mais qui a vocation, avec ce PNAD, à évoluer pour mutualiser les outils en place favorisant les clauses sociales et environnementales. Le PNAD entend ainsi développer, promouvoir et généraliser ce « réseau » en synergie avec les autres réseaux existants, et même proposer un clausier, très attendu par les acheteurs.

On relèvera également l’intérêt porté au facilitateur. Déjà présent sur le secteur social, il a vocation à se développer pour assurer une meilleure couverture territoriale avec l’élaboration d’un cadre de référence commun. Mais il est aussi envisagé le déploiement de facilitateurs environnementaux pour les achats publics.

Mais quelle est la valeur juridique de ce document ?

Matthieu KLUCZYNSKI : Ce plan n’a pas de valeur juridique à proprement parler, il s’agit d’une feuille de route qui n’est donc pas contraignante pour les acheteurs. Cependant, ce plan s’insère dans un cadre juridique aujourd’hui en pleine évolution, notamment avec la loi Climat et résilience du 22 août 2022 et son décret d’application du 2 mai 2022.

Cette loi prévoit la présence obligatoire de considérations environnementales, sous forme de clauses ou de critères, dans les contrats de la commande publique, au plus tard en 2026. Ce plan permet ainsi une montée en puissance des acteurs, de manière progressive au cours des 5 prochaines années, pour intégrer et systématiser la prise en compte du développement durable dans leurs pratiques.

Ce plan est également à distinguer du SPASER (Schéma de promotion des achats socialement et écologiquement responsables) sur lequel il s’appuie largement. LE SPASER est un document que doivent obligatoirement adopter les acheteurs soumis au CCP ayant un volume annuel d’achats supérieur à 100 millions d’euros, seuil abaissé à 50 millions d’euros depuis le décret du 2 mai 2022, afin d’élaborer localement un plan stratégique pour les achats durables, propre à l’acheteur.

Entre feuille de route, texte législatif, texte réglementaire en préparation, et schéma à adopter, les acheteurs disposent de plus en plus de clés pour acheter durable !

Pour en savoir plus, nous vous conseillons de suivre la formation Intégrer le développement dans la commande publique